Octroi des contrats municipaux

Mandat apparent, modifications accessoires, un rappel de certains principes en droit municipal dans un arrêt de la Cour d'appel

Au début janvier 2019, la Cour d’appel rendait un arrêt qui laissera probablement sa marque dans le domaine du droit municipal, plus particulièrement dans le domaine de l’octroi des contrats municipaux. Il s’agit de l’arrêt Saguenay (Ville) c. Construction Unibec inc., 2019 QCCA 38.

On y réitère notamment certains principes en matière de modifications accessoires et de mandat apparent.

Les faits

  • En 2012, les services d’un professionnel ont été retenus, plus particulièrement pour la préparation de plans et devis, service pendant construction et surveillance.
  • En avril 2013, la Ville octroie un contrat à l’entrepreneur pour la construction d’un bâtiment et d’un stationnement.
  • D’autres travaux sont demandés par la Ville, préalablement à la tenue d’un important festival prévu lors de la fin de semaine de la fête du Travail de 2013.
  • C’est ainsi qu’un ordre de changement est approuvé par la Ville lors d’une séance extraordinaire du conseil.
  • Quelques semaines après l’approbation de cet ordre de changement, l’entrepreneur a réalisé devoir transporter une importante quantité de sable afin de procéder au rehaussement du terrain, et ce, afin de permettre l’asphaltage.
  • Dans ce cas, le coût des travaux supplémentaires était de plus de 148 650$ et la Ville refusait de payer, celle-ci étant d’avis qu’une directive de chantier antérieure incluait ces travaux.

Les principes et le moyen d’appel

Un contrat verbal aurait soi-disant été conclu avec la Ville, de par l’approbation de travaux en régie contrôlée par le chargé de projet du professionnel retenu par la Ville. D’ailleurs, le juge de première instance était de cet avis.

Parmi les moyens d’appel, la Cour d’appel observe plus particulièrement la question de la modification du contrat.

De l’avis de la Cour d’appel, des erreurs de droit et de fait ont été commises. Sur la première, il s’agit notamment d’avoir lié la Ville de par une acceptation verbale du représentant, tandis que la Loi sur les cités et villes (la «Loi»), requiert une résolution du conseil. Sur la deuxième, il s’agit d’avoir accepté la preuve à cet effet.

On réitère ensuite certains principes fondamentaux, dont l’exigence de la Loi d’une résolution du conseil ou d’un règlement pour lier contractuellement et financièrement la Ville.

La Cour démontre qu’il est de principe constant qu’un employé ne peut lier une municipalité qui s’exprime par son conseil municipal, et ce, de par la Loi. Bien entendu, un règlement de délégation peut exister dans les municipalités.

Ensuite, relativement aux modifications, la Cour d’appel cite l’arrêt Adricon de la Cour suprême. Il s’agit selon nous d’un arrêt de principe en matière de modifications accessoires. D’ailleurs, la Cour d’appel rappelle que cet arrêt est le fondement même de l’article 573.3.0.4 de la Loi.

La Cour d’appel est d’avis que l’arrêt Adricon reconnait qu’il est possible pour un conseil municipal, si la modification est accessoire et ne change pas la nature du contrat, de modifier le contrat sans nouvelle demande de soumission. Toutefois, une résolution du conseil municipal doit autoriser la modification.

Finalement, la Cour a également refusé d’accorder à l’entrepreneur la restitution des prestations ou de retenir l’enrichissement injustifié.

Dans ce cas, la Ville n’a pas eu à payer à l’entrepreneur le remblayage du sable et son transport.

Conclusion

Cet arrêt rappelle certains principes importants et rappelés à de nombreuses reprises dans la doctrine et la jurisprudence. Cet arrêt ne peut que renforcer ces principes.

 

Date de publication: 15 février 2019

Dernière mise à jour: 15 mars 2019


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Racicot Chandonnet



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